C’est à partir du moment où il a trouvé son propre style que l’illustrateur rignacois Gérard Marty a connu le succès. Aujourd’hui, il consacre son temps et son énergie à sensibiliser le grand public aux arts plastiques et à soutenir les artistes en leur cherchant des mécènes.
Longtemps, Gérard a côtoyé Marty sans jamais le reconnaître. Et réciproquement. Des années durant, ils se sont pourtant croisés au quotidien ; ils ont collaboré aux mêmes projets ; ils ont partagé le même amour du dessin. Un amour absolu, né dès l’enfance rignacoise. Gérard et Marty n’ont jamais cessé de dessiner. D’abord pour leur maman, sur toutes sortes de supports, puis pour plaire aux filles, dans les marges des cahiers d’école. Tout cela ne fait pas une scolarité vraiment exemplaire. « A l’école, on n’a rien fait que des dessins », admettent-ils d’une seule voix. Convaincus que le dessin sera pour eux ou leur métier ou leur perte, ils « montent » à Paris où le punk a déjà pris la Bastille de l’influence artistique et culturelle. Leurs influences à eux ne sont pas vraiment punk : Victor Hugo pour ses dessins à l’encre et l’Aveyronnais Eugène Viala pour le réalisme du trait. Mais avec ce bagage, leur passion pour le dessin et l’enthousiasme de leur jeunesse, ils sont convaincus de pouvoir être publiés un de ces jours. En réalité, la vie Versaillaise de Gérard et Marty, c’est plus petits boulots administratifs que galeries et éditeurs. Gérard s’obstine dans un dessin réaliste auquel personne n’accroche et Marty développe un style BD qu’il n’ose pas montrer. C’est pas la gloire.
A la naissance du premier enfant, Gérard et Marty se mettent en mode hommes au foyer. Couches, biberons et recherche artistique. Ils travaillent les thèmes de leur quotidien : le couple, l’intérieur, la ville, la rue… C’est là, dans l’intimité et l’introspection de l’homme au foyer qu’ils se reconnaîtront tout à coup et se mettront enfin à faire du Gérard Marty. Des instantanés de vie et un trait souple, rond et d’apparence mal assuré. Ce jour où Gérard reconnut Marty eut lieu en 1992 ou 1993. La précision n’a plus d’importance puisque, depuis lors, ils ne forment plus qu’un à tout jamais. « Je travaille beaucoup les arts plastiques avec des handicapés mentaux, à Martiel, explique Gérard Marty. Ils ne se posent pas de question ; ils dessinent comme ils le sentent, sans douter de la qualité de leur trait, sans avoir peur de rien. Moi, pendant très longtemps, je me suis posé des tas de question, je cherchais le trait dont je pensais qu’il allait fonctionner et convaincre le public. Je me refusais le droit de faire ce qui me venait naturellement. Et je me trompais. »
Comme par enchantement, Gérard Marty commença à avoir du succès. Il envoya un jour son recueil de dessins Bouts de vie au quotidien Libération qui, peu de temps après, lui commanda un dessin. « J’avais deux heures pour le réaliser et leur livrer, se rappelle l’illustrateur. Il s’agissait d’illustrer un sujet sur la délation en entreprise, inspiré par un fait divers du moment. Cette première commande m’a donné confiance et je me suis mis alors à démarcher toutes les publications. » Après Libé à partir de 1994, ce fut Le Monde dès 1997 (« J’ai travaillé dans le bureau d’Edwy Plenel », glisse-t-il avec une fierté faussement ingénue), puis Les Echos, Biba, Psychologie Magazine, l’Express, Le Figaro Madame… Six années de reconnaissance nationale et de publication. « J’étais connu, certes, mais cela n’était pas suffisant pour m’ouvrir de nouvelles commandes, en particulier dans la pub et d’autres domaines que la presse, regrette-t-il aujourd’hui. Dans ce monde, les réseaux ont une grande importance et il faut occuper le terrain en permanence pour ne pas disparaître. »
Gérard Marty est donc rentré en Aveyron où il est aujourd’hui médiateur culturel et commissaire d’expositions artistiques pour la mairie de Rignac. L’illustrateur touche à tout, qui fut en son temps l’inventeur du Supermarché de l’Art, crée toujours dans l’atelier aménagé dans les combles de sa maison. Illustration, dessin, peinture, collages, organisation d’expositions… « Depuis quelque temps, je travaille sur le dessin automatique, celui que l’on griffonne sur un bout de papier quand on est au téléphone », dit-il. Il a même inventé le concert dessiné !
Riche de sa longue expérience et soucieux de promouvoir les arts plastiques auprès du plus grand nombre tout en défendant les intérêts des artistes, Gérard Marty a entamé de longue date un vrai travail de militant de l’art partout en Aveyron et ailleurs. Sa dernière idée : créer à Rignac une Maison des Artistes, financée en partie par les entreprises, permettant aux créateurs de travailler dans les meilleures conditions pour un loyer modéré.
Son travail est visible à la galerie Sainte-Catherine de Rodez jusqu’au 26 avril, dans le cadre de l’exposition collective Papier Crash Test.